Un film
de / A movie by Martin Scorsese
Adapté du roman de / from the novel
of Dennis Lehane
Avec / With
Leonardo DiCaprio, Mark Ruffalo,
Ben Kingsley, Max von Sydow, Michelle Williams…
La collaboration Scorsese - Di Caprio semble peiner encore à faire de l’ombre à celle de De Niro et du cinéaste, duo bien plus remarqué et épique à travers Taxi Driver, Casino ou même Les Nerfs à Vifs.
Si Shutter Island marque la quatrième collaboration de des deux artistes, ce n’est pas la plus marquante, nous retiendrons plutôt Les Infiltrés ou encore Aviator.
Martin Scorsese fait une nouvelle fois preuve d’une maîtrise étonnante de son cinéma, mais le récit peine pourtant à instaurer cette tension que l’on espère se renforcer à chaque plan.
Edward Daniels est un marshall des Etats-Unis, et arrive avec son nouveau collègue sur l’île de Shutter Island, au large de Boston, une île cernée par des eaux terribles et des tempêtes tout aussi violentes.
Leur mission : retrouver une pensionnaire de l’hôpital psychiatrique de l’île, volatilisée de sa cellule comme par enchantement.
Leur enquête va bientôt s’intéresser de plus près à cette île-prison, laboratoire psychiatrique isolé du monde, vivant en autarcie et selon ses propres règles.
Ce huis clos insulaire, au milieu des années 60, place le spectateur dans la gabardine et le feutre mou de DiCaprio, un visiteur loin d’être le bienvenu sur l’île.
Dernier refuge pour patients criminels et irrécupérables pour la « société », l’institution de Shutter Island est dirigée par deux psychiatres aussi intelligents que troublants et n’inspire pas vraiment confiance à l’étranger qui s’y aventure.
L’île est le véritable personnage central du film, dont Scorsese restitue les aspérités brillamment. Les vagues se fracassent contre les falaises abruptes, les tempêtes détruisent les arbres et fragilisent l’équilibre de vie de cette communauté, dont le seul contact avec l’extérieur est un ferry assurant la navette. D’emblée, cet univers se révèle hostile et peu amène envers les deux marshalls, qui doivent par ailleurs résoudre le mystère de la disparition avec le peu d’éloquence du personnel de l’hôpital.
Et c’est précisément là que le film peine à trouver le souffle, la tension extrême que nous attendons, les personnages sont écrasés par cet environnement indomptable et insondable, et malgré le talent des comédiens, le film reste toujours en équilibre, sans jamais sombrer dans cette folie salvatrice qui aurait emmené le spectateur bien plus loin.
Le rebondissement final n’est malheureusement pas aussi étonnant que nous aurions pu l’attendre et n’est pas le vrai point d’orgue d’un film dont la tension lui a échappé au fil des plans.
Scorsese est un brillant cinéaste et malgré les écueils de Shutter Island, cela reste un très bon film, qui vaut définitivement le voyage au bout de l’enfer qu’est un périple sur cette île dont on ne revient pas.
Arnaud Meunier
10/03/2010